8 Décembre 2024
Mercredi 23/10 lever 6:00, nous nous préparons à lever l’ancre: bimini rangé, annexe dégonflée et pliée dans son sac, les équipements sécurisés.
Arrivés par la passe Ouest, nous repartons par la passe S-O, tout en parant avec précaution les "patates" de corail signalées sur la carte.
Le vent est Est S-E 12 à 16 nd, très favorable pour notre route.
La navigation reprend ses droits avec une minutieuse étude des bulletins méteo que nous téléchargeons 2 fois par jour par le réseau satellite Iridium.
Il faut éviter les coups de vent violents, mais aussi les zones de calme.
L’idéal est de tracer notre route dans des vents de 12 à 25 noeuds si possible au portant, pour être confortables.
En cela nous sommes assistés par un "routeur" professionnel qui nous indique les prochains way-points à viser.
Plusieurs grains tropicaux nous apportent du vent fort à négocier au près. Il nous faut réduire la toile par 1, 2 ou 3 ris.
Dans le carré nous jouons les équilibristes et les repas sont réduits à la plus simple expression.
A éviter pour ceux qui ont le mal de mer!
Le pilote, le 4ème équipier, à l’oeuvre
Nous progressons bien à 6 noeuds au fond....
Vendredi 25/10 c’est la tuile !
Vers 15:00 sans heurt et quasiment sans bruit la dérive de 300 kg a cédé. C’est la stupeur parmi l’équipage. Elle a filé sous la coque, retenue par les seuls bouts de relevage....( l’Allure 44 est un dériveur intégral)
On l’entend taper contre le dessous de la coque au gré de la houle.
Pour éviter de plus grands dommages, notre skipper Marc a décidé de s’en séparer. Elle pourrait aussi endommager l’hélice du moteur. De toutes façons ce n’est pas réparable en mer.
Le bout de relevage qui la retient est libéré et elle disparaît rapidement dans les profondeurs.
Le temps d’analyser la situation et comprendre ce qui s’est passé on se laisse dériver à la cape.
La réalité s’impose.
Le bateau n’est plus en état de naviguer de façon sûre dans des eaux difficiles. Nous devons abandonner notre programme de navigation en Patagonie.
A plus d’1/4 du parcours vers Puerto Montt couvert nous devons faire demi tour avec regret.
Nous prenons la route inverse dans le N-O pour regagner Tahiti où un chantier spécialisé dans les coques alu est capable d’expertiser notre mésaventure et remettre le bateau en état. Mais il faudra attendre plusieurs semaines la fabrication d’une nouvelle dérive car ce n’est pas disponible sur étagère.....
Seuls au milieu du Pacifique
Pour l’équipage l’aventure se terminera dans l’ishme de Taravao.
Il y a 1100 mn à couvrir, soit une bonne quinzaine de jours suivant le temps.
En effet les performances du bateau sont dégradées: moins de capacité à remonter au vent, forte dérive, vitesse réduite de moitié.
Il faudrait que les vents soient portants du Sud S-E. Ce n’est pas le cas aujoud’hui, il faut attendre la semaine prochaine, mais ils seront faibles.
On se console en pensant que personne n’est blessé, que le bateau n’est pas en danger.
Dans ces airs légers la cuisine revient en force: gâteaux d’apéritif, cake aux lardons et olives,....de quoi nous remonter le moral.
Mais il faut rester vigilant, car de temps à autres des grains ou des coups de vent peuvent surgir brutalement sans crier gare.
Il faut alors se précipiter à la manoeuvre et prendre 1 ou 2 ris.....qu’il faut parfois relâcher 1/2 heure plus tard.
Le 5 novembre nous approchons de Tahiti par le S-O.
Nous irons nous ancrer dans le port Phaeton situé en face du chantier, un abri sûr contre les cyclones, en attendant de tirer le bateau au sec.
Une trace de 1235 miles nautiques jusqu’à Taravao.
Sortie du bateau hors de l’eau et mise sur ber pour un "hivernage" forcé.
Voici le reste de la cause de notre infortune.
La dérive s’est cassée net au dessous de l’axe de rotation.
Après 2250 mn en Polynésie dans la chaleur humide, c’est le retour vers Paris et la grisaille avec le regret de n’avoir pas pu parcourir les canaux de Patagonie.
D’un autre côté je pourrai partager Noël en famille et retrouver enfants et petits enfants. Il y a toujours un volet positif dans l’adversité.
Pour compléter ce récit, rendez-vous sur le blog de Marc, skipper-propriétaire:
https://opaleenpatagonie9.wordpress.com/2024/11/15/le-grand-depart-vers-la-patagonie/